« Alifa Condè », plus de 72 ans, le numéro nul guinéen vient d’effectuer une visite de 72 heures au Congo de Nguesso, avant de poursuivre son aventure à Malabo pour « grimper » au sommet de l’Union Africaine…
Après la Guinée Equatoriale (pays pétrolier géré familialement), reviendra-t-il directement en Guinée Dictatoriale (pays de bauxite aux mains d’un clan) ou poursuivra-t-il sa mobilité dans un autre pays despotique?
En tout cas, c’est le premier bain de ce foufou depuis son intronisation en décembre 2010. Evidemment, je parle de bain de foule (ce qui, sous nos tropiques, suppose un peu de poussière ; cela dit, l’hygiène d’AC ne me regarde pas !). Il a reçu du président Sassou l’accueil qu’il ne peut obtenir en Guinée, même dans l’hospitalier pays Soussou. Le genre de petits cadeaux que se font les autocrates.
En manque de « mamaya », il a pu apprécier la réception à Maya Maya (l’aéroport international de Brazza) avant de visiter, entre autres, le village agricole de Nkouo (pas N’ko, comme il pourrait le croire !) et le barrage d’Imboulou. Le « faux prof » saura-t-il copier ce qu’il y a de meilleur au Congo ? Rien n’est moins sûr. Il a fait importer pour la Guinée une grosse quantité d’engrais sans rapport qualitatif avec nos besoins (le sol guinéen, très fertile mais sous exploité, n’a pas encore besoin de traitement particulier ; c’est donc un scandale que notre pays importe du riz).
Pour AC, « l’électricité est le plus grand problème de l’Afrique ». Quel scoop ! Au lieu d’être fier de ce que les autres font, en l’occurrence le barrage congolais, pourquoi ne met-il pas en valeur notre propre potentiel hydroélectrique ? N’est-ce pas être « kafiri » que d’abandonner le barrage de « Garafiri » dans son état actuel ? N’est-il pas honteux que la sahélienne Nouakchott soit mieux éclairée que la pluvieuse Conakry ?
Pendant qu’AC s’intéresse à l’Union Africaine, la Guinée est sur le point de se casser. Son ministre de la décentralisation, un autre Condé, moins enclin à l’administration du territoire qu’à gérer des terrains, désunit, à son niveau, le pays en suspendant des responsables communaux qui auraient dévié de « la ligne directrice du parti », le RPG, fils spirituel du sinistre PDG. Que ces responsables communaux s’estiment heureux car si les temps ont changé, tout n’a pas changé : ils restent suspendus mais ne seront pas pendus ! Quoique…
Les suspendus sont accusés de mauvaise gestion, avec un avant-goût de « tribunal populaire » hérité de l’ère Sékou. Un comble ! Qui, en réalité, gère bien quelque chose en Guinée ? Même le « grimpeur » a des vertiges en parlant de la montée vertigineuse des prix et demande aux syndicats (mon oeil !) de l’aider à réfléchir. Pour des raisons tacticiennes, il a infléchi sa position en trouvant comme boucs émissaires seulement quelques-uns et non tous les « n°11 » (expression humoristique désignant les Peulhs dont certains portent 2 petites taillades à chaque tempe, pratique en voie de disparition).
Je l’ai dit, redit et continuerai à le dire sans relâche : AC est un danger pour l’unité nationale. Ce marxiste fétichiste qui s’auto satisfait de parler sans « le langage de bois » (c’est lui-même qui l’a dit après avoir reçu des patrons français), s’exprime comme un boa pour étouffer tout ce qui pourrait aller dans le sens de l’apaisement social. Lorsqu’il promet de « prendre la Guinée là où Sékou Touré l’a laissée », beaucoup n’ont pas compris le sens de son projet. La Guinée, longtemps en panne, a été débarrassée d’AST à un carrefour avec des « sorties » économiques (presque tout l’appareil productif était en faillite sauf la production d’alcool et de cigarettes), politiques ( le PDG écrasait tout de manière « globale et multiforme »), culturelles (tout était à la gloire du chef, destinataire unique des louanges) et sociales (le « clan » de Faranah, très égoïste, était obèse, ce qui n’est pas la preuve d’une bonne santé alors que peuple se contentait de miettes).
C’est cette dernière « sortie » qu’AC, auteur d’un « code de déroute » veut emprunter. Le « Klan des Condè », voulant perpétuer sa dynastie, n’a identifié qu’un seul obstacle : les Peulhs. L’objectif final d’AC, qui n’a rien d’écolo, est une solution finale très spécifique : éliminer cette « faune » de son habitat naturel.
On parle souvent d’usure du pouvoir pour des dirigeants restés trop longtemps à la tête de leurs pays. C’est oublier qu’il y a aussi une usure de non pouvoir pour ceux qui se sont installés pendant des décennies dans l’opposition stérile. C’est le cas d’AC. Il est arrivé fatigué au pouvoir, ce qui signifie qu’il ne peut rien construire de positif. Mais, ce n’est pas parce qu’on est usé qu’on n’a pas de capacité de nuisance. AC, président de certains Guinéens, est le plus grand profiteur de la division du pays.
Le meilleur exemple de cette division est donné par le fonctionnement des « coordinations régionales ». Celles-ci ne devraient pas avoir leur place dans un Etat qui se veut unitaire. Certes, elles ne sont pas illégales. Mais elles manquent cruellement de légitimité. En effet, comment leurs membres sont-ils élus ? Qui représentent-elles ? Sont-elles des relais du pouvoir central ou des instruments au service de barons locaux ?
Tant qu’elles étaient confinées à un strict rôle social, cultuel et culturel, on pouvait, à la limite, les tolérer. Mais, sous le couvert d’objectifs sociaux à atteindre, elles se sont politisées et ont été instrumentalisées à outrance, notamment par AC.
La « coordination mandingue » est la plus dynamique car elle a réussi à canaliser Sékouba Konaté pour faire d’AC le chef contestable mais réel de l’Etat. Sa sagesse est douteuse car elle a préféré pendant les élections, même dans le cadre de « primaires », un étrange aux origines douteuses (AC, né à Boké, devenu son fils adoptif) à un natif du pays (Lansana Kouyaté) ! Elle renferme plus d’anciens que de sages. AC s’appuie sur elle.
La « coordination forestière » a eu son heure de gloire sous Dadis et ne s’est jamais remise de la neutralisation de ce dernier. Elle a pour particularité de gérer les Guerzés, les Tomas et les Kissis dont l’unité n’est que de façade, faiblesse qu’exploite AC pour la satelliser au profit de la coordination mandingue. Aujourd’hui, Dadis Camara, réduit à l’état de légume par suite d’une consommation involontaire de « toumbacine » (balles de Toumba Diakité) tue le temps à Ouagadougou. Le temps risque de l’y tuer ! Quand est-ce que les Forestiers comprendront-ils qu’à côté du « Tout sauf un Peulh » trop visible, il y a un sibyllin « Tout sauf un Forestier » ? Qui ne se souvient du comportement d’Ismaël Touré à l’égard de Lansana Béavogui au lendemain de la crevaison de Sékou Touré ? Si Dadis (que je ne regrette pas d’ailleurs) a pu prendre le pouvoir, c’est parce qu’il portait le nom «Camara» que beaucoup d’ethnies ont en partage. Lorsque sa vraie identité s’est révélée, on s’est bien occupé de lui.
La « coordination du Fouta », nombreuse mais inefficace. Elle serait nobélisable pour sa mollesse. Comment, par exemple, accepte-t-elle que dans un pays laïc, le gouvernement limoge ses imams ? Ses membres ont plus peur de la gendarmerie que de DIEU. Sait-on pourquoi ALLAH rejette certaines prières ? C’est parce qu’IL regarde le cœur du demandeur avant d’écouter ce qu’il dit ! ALLAH préfère un croyant aux dents pourries mais au cœur pur qu’un hypocrite qui le sollicite en permanence. Mieux vaut prier seul que derrière un imam nommé par décret. AC manipule cette coordination à sa guise par le truchement d’individus comme son « honorable » ministre « cordonnier » des TPD (Travaux Petits et Déshonorants). C’est la coordination la moins représentative et la plus blablateuse du pays. C’est aussi la plus bête et la plus peureuse : elle bénit son futur bourreau au lieu d’œuvrer à la constitution d’une « Brigade d’Autodéfense » pour protéger une communauté menacée, non pas dans ses intérêts économiques mais dans son existence physique !
La « coordination de la Basse Côte » a déjà le berceau mais pas encore le bébé. Elle se cherche entre un gros commerçant inculte mais argenté, Mamadou Sylla, un chef de micro parti dont la totalité des membres pourraient tenir dans un taxi collectif « Ala ka bon » (Dieu est Grand), Kassory Fofana, un général véreux aux propos venimeux, Facinet Touré, etc. AC la convoite et est décidé à la contrôler.
Le danger pour la Guinée est que toutes ces coordinations ne s’articulent qu’autour de groupes ethniques dominants. Elles ne sont pas régionales mais régionalistes. Dans le climat actuel, la « coordination mandingue » ne pourra jamais être dirigée par un Ly ou même un Diakité, encore moins un Tolno. Car ce n’est pas une affaire du Mandé mais de Malinkés. La « coordination du Fouta » n’acceptera pas d’avoir à sa tête un Sagno. Car ce n’est pas une affaire du Fouta, pourtant multiethnique, mais de Peulhs. La « coordination forestière » voudra-t-elle d’un Sow pour la diriger ? Pourtant, ce ne sont pas des Peulhs, natifs de la Forêt, qui manquent. La « Basse Guinée » n’a pas encore son leader mais elle ne le cherchera certainement pas parmi des Dramou, Condiano, Soropogui, « Adovogui », « Bahvogui », etc.
Ce que je veux dire est simple : tant que dans la tête des Guinéens, la Guinée maritime ne sera considérée que comme la terre des Soussous, le Fouta comme la région des Peulhs, la Haute Guinée comme le territoire des Malinkés et la Forêt (qui se « savanise » sur le plan végétal et ethnique) comme le terroir exclusif des Forestiers, ils ne formeront pas une nation. Une des conditions pour bâtir une nation est de considérer tout citoyen comme autochtone où qu’il se trouve sur le territoire national.
Dans ces conditions, que faire des coordinations en cause ? Tout dépend de ce qu’on veut. Si nous voulons un Etat unitaire, il faut les supprimer car elles prennent en otage la classe politique. Si nous optons pour un Etat fédéral, elles peuvent être considérées comme des prémices de fédéralisme et même, n’ayons pas peur des mots, de sécession, le cas échéant.
Quoi qu’il en soit, nous devons sortir de l’ambiguïté actuelle car les coordinations telles qu’elles fonctionnent à ce jour, restent semblables à un ramassis de parasites et sont incompatibles avec l’édification d’un Etat moderne. Ou elles se cantonnent à un rôle purement social (preuve de la carence de l’Etat) en s’occupant de tous les ressortissants des régions diversifiées qu’elles représentent ou elles disparaissent totalement. Je souhaite leur élimination du paysage politique car, par notre laxisme, nous sommes sur le point de passer progressivement de la régionalisation du PDG au régionalisme du RPG.
Le régionalisme du RPG n’est que la phase préliminaire du programme d’AC en vue de marginaliser la communauté Peulhe. C’est maintenant qu’il faut se lever car le temps joue en faveur d’AC. Pour l’instant il n’a pas la puissance qu’avait avant décembre 1989, Ceaucescu, le « génie des Carpates ». Aujourd’hui, AC n’est qu’un « gourou des carpettes » mais il s’enracine lentement et sûrement. Loncény Camara, l’intérimaire de la CENI et carpette de d’AC, n’a-t-il pas dit que « …la CENI va appliquer les décisions du président Alpha Condé »? N’a-t-il pas ajouté que « le chef de tous les Guinéens, c’est le chef de l’Etat qui est le chef de toutes les institutions » ?
Un seul individu contrôlant toutes les institutions, voilà la démocratie q’AC nous prépare. Ce n’est pas pour rien que ce zéro qui se prend pour un héros a réservé sa première visite officielle à Sassou. Il n’y a pas meilleur conseiller pour apprenti dictateur qu’un dictateur confirmé. Pourquoi AC ne s’est-il pas d’abord rendu officiellement au Cap-Vert, en Sierra Léone, en Guinée-Bissau ou au Niger, Etats aux présidents démocratiquement élus ? Le « Pr. AC » a préféré s’inscrire à la faculté de Sassou avec qui il vient de renforcer les « liens historiques d’amitié et de coopération qui lient [nos] deux pays »! Avec « des liens qui lient… » nous serons bien liés!
AC n’est pas fort ; il est même très peureux. Le vrai problème est qu’il n’a aucune opposition déterminée en face de lui. C’est le seul qui complote contre la Guinée en plein jour car il tire sa confiance de notre mollesse. C’est pourquoi il ne faut pas le sous-estimer et se contenter de le tourner simplement en dérision. Il faut le combattre avec vigueur. Pas uniquement par le droit dont il n’en a rien à foutre mais surtout par la force, le seul langage qu’il comprend. C’est maintenant qu’il faut terroriser ce terroriste.
Pour terminer, pas de perle du Net mais un constat. Voyez comment les Sénégalais se font respecter. Une coupure de courant de moins de 24h leur suffit pour faire plier le pouvoir. En Guinée, plus de 24 ans d’obscurité ne nous suffisent pas pour vouloir de la lumière. Quelle Guinée, pays de « moutons » qui n’ont même pas de laine !
Ibrahima Kylé Diallo