La culture de violence politique et d’impunité en Guinée
A partir des années 1954, sous la direction de Sékou Touré, le PDG instaura en Guinée une politique de violence et de coercition. Les quatre années qui précédèrent l’indépendance furent marquées par des affrontements sanglants entre les partisans des différents partis politiques. L’instigation de cette violence était principalement le fait du PDG. Après l’accession du pays à l’indépendance en 1958, le ralliement des adversaires au parti majoritaire du PDG ne fit rien pour tempérer la violence grâce à laquelle Sékou Touré avait triomphé. Les anciens adversaires politiques seront liquidés méthodiquement et systématiquement à travers des complots fictifs. La dictature de Sékou Touré entraina la mort de milliers de personnes. Elle força à l’exil plus d’un tiers de la population et ruina l’économie du pays. La culture de violence et de répression instaurée par le PDG a profondément imprégné les mœurs politiques guinéennes. Les responsables de détournement massifs des ressources nationales, d’assassinats et de massacres de citoyens échappent systématiquement à la justice – à quelques exceptions près où ils sont liquidés nuitamment dans des règlements de comptes. Pour se perpétuer, la corruption, la violence politique et l’impunité des criminels d’état se dissimulent derrière l’ethnocentrisme. Le résultat de ces pratiques sur plus de six décennies est une nation guinéenne en faillite, avec une économie délabrée, une justice déliquescente et des « conflits » artificiellement entretenus qui menacent le pays dans ses fondements.
Introduction
La situation de la Guinée n’est pas une fatalité. Elle a été créée par l’histoire. En tant que telle elle peut être enrayée par un sursaut citoyen. C’est, conscients de la nécessité de ce sursaut que des représentants du Collectif contre l’impunité en Guinée (CCIG) et Pottal-Fii-Bhantal, notamment à travers son programme JUSTICE IN GUINEA ont engagé des échanges qui ont confirmé une convergence d’analyses et d’objectifs entre leurs organisations. Suite à ces échanges, des membres du bureau du Collectif contre l’impunité en Guinée (CCIG) ont rencontré le président de la commission centrale de Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon à Paris durant le mois d’Avril 2017. A l’issue de la rencontre, il a été convenu d’élaborer un mémorandum pour officialiser la collaboration entre les deux organisations, engagées dans l’éradication de la gangrène de l’impunité en Guinée. Le présent mémorandum met en avant des champs d’actions communes de nature à renforcer la lutte contre l’impunité dans le court, moyen et long terme, notamment sur les faits suivants :
Les crimes politiques
Les crimes contre l’humanité commis le 28 septembre 2009 en Guinée
Le déni de justice sur les crimes contre l’humanité du 28 septembre 2009 dans le sens de l’article 17.2.a.b.c du Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale qui dure depuis bientôt sept ans interpelle sur la passivité de la CPI. Ce déni de justice est l’une des causes majeures de nombreux crimes politiques depuis 2010 qui ont engendré une centaine de victimes innocentes dont certains hauts cadres de l’État assassinés et des milliers de blessés par les forces de l’ordre sans aucune ouverture d’enquête en totale violation des exigences légales. Le CGIG et Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon s’engagent à accentuer les actions de pressions auprès des instances internationales pour la traduction en justice des personnes inculpées pour crimes contre l’humanité commis le 28 septembre 2009 en Guinée et les auteurs d’autres crimes de sang et crimes économiques restés impunis. A cet égard, le CGIG et Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon vont élaborer des communiqués communs et organiser des manifestations au sein de la Diaspora guinéenne. En même temps, les deux organisations vont assister les victimes et les organisations de la société civile en Guinée, à organiser des manifestations sous les formes qu’elles jugeront adéquates pour commémorer la journée du 28 Septembre 2009 et exiger que justice soit rendue dans la transparence et sous les auspices de la CPI.
Les massacres de manifestants commis en janvier et février 2007 en Guinée
Nous travaillerons également entre autres, sur les crimes de janvier et février 2007 qui comportent suffisamment d’éléments constitutifs de crimes contre l’humanité, sans faire abstraction des massacres des policiers par certains éléments de l’armée guinéenne dans les locaux de la Compagnie mobile d’intervention et de sécurité (CMIS).
Les autres crimes de sang
Les deux organisations vont mettre en place une commission conjointe afin de recenser les crimes politiques (tels que les massacres de Zogota, les crimes de 2006, 2007, 2008, l’affaire de Soronkoni, les agressions contre les populations de Mali Yembering, enlèvement, torture et assassinat du frère de Toumba Diakité par des gendarmes etc..), les victimes ainsi que toutes informations pertinentes sur les auteurs présumés afin d’engager des actions judiciaires au niveau national ou international. En outre, les données recueillies seront sauvegardées dans des bases de données et diffusées en ligne. La commission conjointe coordonnera les actions de lobbying en faveur de la justice en Europe, aux États-Unis et en Afrique pour demander des sanctions ciblées contre les présumés auteurs des crimes en question, les hauts cadres du gouvernement guinéens et autres personnes engagés dans l’obstruction du processus judiciaire sur ces crimes.
Soutien aux victimes
Plusieurs exemples montrent que dans les pays qui ont réussi à endiguer l’impunité, l’organisation des victimes et la prise en charge de leurs propres revendications est un passage obligé. Ainsi, les deux organisations s’engagent à renforcer leurs efforts dans ce domaine. Notamment, elles mettront en place une commission conjointe pour explorer toutes les possibilités d’aide matérielle, de soutien moral et juridique auprès des organisations spécialisées afin que les victimes de violence politique sortent de l’anonymat dans lequel elles sont maintenues. Une commission conjointe procèdera au recensement exhaustif des victimes et à l’inventaire de leurs témoignages.
Interpellation des partis politiques
Une commission spéciale se chargera d’interpeller constamment les partis politiques sur leur responsabilité morale sur le dossier du 28 Septembre ainsi que les crimes politiques qui essaiment la vie politique nationale. Les députés, les responsables politiques et les militants des partis seront constamment l’objet de campagnes communes du collectif et de Pottal pour requérir leur participation effective. Les militants et l’opinion publique seront informés du degré de participation de chaque parti politique afin de faire de la lutte contre l’impunité une priorité nationale.
Lutte contre la corruption et les crimes économiques
La corruption et les crimes économiques défraient la chronique en Guinée. Le pillage des ressources de l’État, la corruption et l’impunité dont jouissent les criminels engendrent les frustrations sociales que les pouvoirs guinéens successifs exploitent pour exacerber l’ethnocentrisme. Plusieurs projets seront mis en œuvre dans le domaine de la lutte contre la corruption et les crimes économiques sur les fondements des instruments juridiques nationaux de nombreuses conventions internationales dont la Guinee est signataire. On peut citer notamment, le préambule de la constitution guinéenne qui rend le crime économique imprescriptible, la Convention de lutte contre la corruption des agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales de l’OCDE du 21 novembre 1997, la Convention des Nations-Unies contre la corruption issue de la résolution N° 58/4 du 31 octobre 2003 de l’assemblée générale des Nations Unies qui compte actuellement 165 États parties. Cette dernière convention en particulier stipule que les fruits de la corruption peuvent être saisis et restitués aux États victimes.
Parmi nos projets, on peut mentionner notamment les projets ci-dessous.
- Recensement des biens des haut cadres guinéens à l’étranger ainsi que leur train de vie afin d’engager des poursuites auprès des pays hôtes.
- Faire du lobbying pour que les complices occidentaux de corruptions et de blanchiment d’argent de la corruption (banques, opérateurs et intermédiaires économiques etc.) soient sévèrement punis.
- Cette campagne doit viser les syndicats, les travailleurs et les sociétés civiles occidentales pour les rendre solidaires des actions de lutte contre la corruption et son corollaire de violation des droits de l’homme et de l’appauvrissement extrême des populations.
Actions de longue durée : éducation citoyenne et renforcement de la société civile.
Conscientes que l’enracinement de la démocratie en Guinée ne consiste pas à un simple changement à la tête de l’État, les deux organisations s’engagent à inscrire ces projets dans la durée. Éradiquer l’impunité passe par l’éducation des citoyens et le renforcement de la société civile guinéenne qui a été ruinée par l’idéologie de l’ethnocentrisme. Il est essentiel d’identifier et soutenir des actions Ad hoc avec des sources de financement ainsi que des appuis d’ONG. Parmi ces actions on peut citer :
- La mobilisation citoyenne et l’éducation des jeunes, des femmes qui sont les victimes les plus exposées aux pillages de l’État et aux violations des droits de l’homme.
- Éducation citoyenne sur les effets néfastes de la corruption et de ses corollaires que sont les violations des droits de l‘homme et la misère économique.
- Vulgarisation de la constitution et des droits des citoyens par des séminaires.
- Éducation des acteurs de la société civile.
- Pression sur les partis politiques pour incorporer la lutte contre l’impunité dans leurs actions.
Pour le Collectif Contre l’Impunité en Guinée Pour Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon