Dans le monde entier, lorsqu’arrive un funeste événement (accidents, catastrophes, morts naturelles, attentats, manifestations où des hommes se blessent ou meurent…) des enquêtes sont menées…
Pour comprendre ce qui s’est passé et l’éviter dans le futur. Pour interpeller la justice et dire le droit, si nécessaire. C’est un usage universel. Sauf en Guinée. C’est comme si notre pays est en marge de l’espèce humaine. Notre justice ne se manifeste que quand il s’agit de vie ou des intérêts de notre président.
Si celui-ci est touché elle s’ébranle. Elle est anesthésiée, en hibernation tant que c’est le pauvre qui trinque. Pareil pour la RTG, l’ex voix de la Révolution transformée en voix du PRG, de sa famille politique et de son épouse (surtout quand celle-ci se tape une fondation). Pour les populations de l’hinterland, revenez demain !
Pour illustrer notre propos, nous prenons des exemples (non exhaustifs) sur notre passé immédiat.
*Dans la nuit du 19 juillet 2011, attaque du domicile du président de la République. Dès le lendemain, la justice est saisie. Et la gendarmerie et la police s’ébranlent ; des individus civils ou militaires sont arrêtés. Il y a quelques jours, plus d’une vingtaine viennent d’être déférés devant le Tribunal.
*Le 3 avril 2011 : Cellou Dalein, le patron de l’UFDG rentre de voyage. Ses militants veulent l’accueillir (comme le consacre la constitution). Le gouvernement Alpha refuse. Les militants passent outre. On tire sur eux. De nombreux blessés et morts d’hommes. Pas d’enquête. Tant pis pour le mort et les siens. Le gouvernement s’en fout et la justice s’en balance.
*Galakpaï, mai 2011. Troubles entre malinkés et Kpellès : une trentaine de morts ; la soldatesque intervient. Arrestations, embastillements, la justice s’en mêle (ndlr, c’est l’ethnie du président qui est touchée).
*Novembre 2010 : les résultats électoraux sont proclamés. Les perdants, frustrés, manifestent. Les farces de défense et de sécurité tirent dans le tas à Conakry ; 7 morts. Tant pis pour les morts et les leurs. A Pita, Labé et Mali, des agents de la Fosse-pèle-gâchette facile, chargés de protéger les citoyens, violent des femmes, volent et pillent. Avec la complicité passive des préfets et gouverneurs qui protègent les délinquants. Ils ne sont ni démis de leurs fonctions, ni poursuivis par la moindre justice. Même après la prestation de serment du nouveau président de la République, personne n’en parle. Tant pis pour les violées.
*Toujours en novembre 2010, à Mamou, Dalaba, Pita et Timbi Madina, des maisons sont incendiées, appartenant ou abritant des sympathisants de l’alliance arc-en-ciel, sont brûlées. Zéro enquête, zéro poursuite : la justice s’en fout. Tant pis pour les victimes.
*Octobre 2010 à Siguiri : un parti politique affilié à l’alliance arc-en-ciel organise une chasse aux Peulhs (sympathisants de l’alliance Cellou Dalein président) dans la commune urbaine.
Brutalités, pillages, incendies. Un homme (ndlr, gros opérateur économique) est tué, laissant trois veuves. Avec la complicité des autorités civiles et militaires de Siguiri. Le général Konaté, alors président, ne dit rien. Le gouvernement Doré ne dit et ne fait rien.
La justice s’en fout. Tant pis pour les victimes et leur communauté.
Merde à l’unité nationale.
*28 septembre 2009 : des militants des partis politiques manifestent au stade du même nom. Le CNDD lâche ses tueurs habillés en militaires (de vrais militaires dignes de ce nom ne feraient pas ce que ces monstres ont fait). Qui tuent, volent, violent. Le monde entier s’émeut. Pas le CNDD. Pas la justice guinéenne. Notre nouveau président, démocratiquement élu, n’en parle même pas dans son discours d’investiture. La justice guinéenne s’en fout. La justice internationale s’intéresse à ces criminels. Pire, le Grimpeur (Alpha Condé) les fait grimper à côté de lui, les nomme dans son gouvernement. Parce que, dit-il à une radio étrangère, il a besoin de leur expérience (ndlr, en matière de terreur ?). Les victimes, les ayant-droit et les ayant-cause, le gouvernement Alpha n’en a cure.
* Janvier-février 2007 : Insurrection nationale contre Fory Coco et sa gestion patrimoniale de la Guinée. Brutale répression des FDS : plus de 150 morts. Pas d’enquête. Pas de justice. Les assassins courent toujours. Le peuple, l’éternelle victime de ses élites, n’a pas oublié.
* Fevrier 1996 : Des soldats essaient d’arracher le pouvoir à Conté. Ils échouent. Arrestations massives, justice sommaire et immédiate. Les coupables sont châtiés.
* 1991 N’Zérékoré : les élections communales sont l’occasion de troubles entre malinkés et Guerzés. Un nombre inconnu de personnes perdent leur vie. Parce que zéro enquête, zéro justice.
* Juillet 1985 à Conakry : Lansana Conté se tape un complot. Les cadres malinkés de l’armée sont rafllés, embastillés et exécutés. En sautant la justice (pas besoin d’être champion olympique pour la sauter, celle-là !)
* Sous la 1ère République et tous les Guinéens le savent, il était préférable d’être voleur, assassin ou prévaricateur que d’être comploteur ou mercénaire. On peut porter atteinte aux citoyens et à leurs biens. Mais toucher à Sékou, l’homme peuple ? Un crime inexpugnable !
*Plus récemment en Mai et Juin de cette année : le Général Fasciné Touré, un vieux reliquat des putchistes du 03 avril 1984, complice des massacres anti-malinké de Juillet 85 (E-Fatara) récidive. En déclarant en public à travers les médias que les peulhs (plus de 40% de la population guinéenne) doivent être exclus des mécanismes de prise de décision politique en Guinée.
La Guinée selon lui, ne devrait pas accepter un Président peulh !
Cette déclaration séditieuse est un crime contre l’Etat, contre l’unité nationale. Mais le pire, c’est que le PRG au lieu de poursuivre ce triste sire, le confirme immédiatement médiateur de la République. Cette récompense est une véritable insulte contre la Guinée.
Une chronique de Bah Mamadou Lamine (Le Lynx), ancien Rédacteur en chef de Frat-mat.