Interview de M. Mamadou Billo Sy Savané le site « leguépard.net »

Il n’y a pas eu d’élection, mais DÉSIGNATION par Sékouba KONATÉ et Jean-Marie DORÉ de celui qui était déjà coopté par des réseaux occultes, peut-être extérieurs à notre pays…

Important : C’est suite aux insistantes demandes de certains internautes guinéens ne disposant pas d’internet à haut débit leur permettant de visionner les vidéos que nous avons décidé de publier la version écrite de l’interview vidéo de M. Mamadou Billo Sy Savané encore disponible sur le site « leguepard.net ». Bonne lecture.

Monsieur SY SAVANÉ, vous êtes bien connu de nos compatriotes, aussi bien à l’Intérieur qu’à l’extérieur de notre pays. Vos interventions écrites sur les sites guinéens et parfois dans les journaux, sont toujours remarquées.

Mais c’est la première fois que vous exprimez sur une radio. C’est sur celle de Le Guépard. Nous vous en remercions. Si vous le voulez bien, nous allons organiser cette interview en trois parties.

Nous parlerons d’abord de l’actualité guinéenne, c’est-à-dire depuis la campagne présidentielle à laquelle vous avez pris part en tant que soutien de M. Sidya Touré, jusqu’aux récents évènements (l’attaque de la résidence privée de M. Alpha Condé). Ensuite, nous vous demanderons de nous préciser votre vision de ce que doit être notre pays au plan économique. Et enfin, nous parlerons ce que doit être la place de la « communauté internationale » dans un pays comme le nôtre.

leguepard.net : Dès l’annonce de « l’attaque » de la résidence privée de M. Alpha Condé à Conakry, vous avez émis de sérieux doutes sur la réalité d’une conspiration viserait à assassiner M. Alpha Condé. Qu’est ce qui fondait vos doutes ?

Mamadou Billo SY SAVANÉ (M.B.S.S.) : Je dois d’abord préciser que je n’ai rien contre la personne de M. Alpha Condé. Je ne lui souhaite pas de malheur. J’ai été un des touts premiers à prendre sa défense, modestement certes.

Mais je l’ai fait avec persévérance, car il avait été arbitrairement emprisonné par Lansana Conté. Bien. Revenons sur la supposée attaque surprise. Ce jour-là, le jour de « l’attaque », comme par une mystérieuse prémonition, il ne dort pas dans ce qu’il nous présente comme sa chambre. Il est ailleurs.

Vers trois heures ou quatre heures du matin, un seul ambassadeur est avec lui à l’endroit où il se trouve, c’est l’ambassadeur de France, pas n’importe lequel. Celui désigné du temps de M. Bernard KOUCHNER alors ministre des Affaires Etrangères de la France, par ailleurs ami personnel de M. Alpha Condé. Encore une coïncidence.

Les « assaillants » qui seraient venus pour « l’assassiner », auraient disposé de trois pick-up, de lance roquettes et autres armes. Avouez que comme tentative d’assassinat, on peut faire plus discret.

Qui peut imaginer un seul instant, que pour assassiner un seul individu, fut-il M. Alpha Condé, on mobilise tant de moyens indiscrets et de façon si ostensible. Tout ce montage est grotesque et donc risible.

leguepard.net : Vous ne croyez donc pas ni à la tentative d’assassinat, ni de coup d’Etat ?

M.B.S.S. : Ecoutez ! Moi je ne demande qu’à être convaincu. Une heure après les coups de feu, M. Alpha Condé se précipite à la RTG, ou y fait diffuser un message, probablement rédigé depuis plusieurs jours. Il fait état d’arrestations de militaires cueillis à leur domicile, d’ailleurs tout endormis.

Dans la foulée, il déclare que d’autres arrestations viendront et que des civiles seraient impliqués. Il ajoute que ses supposés assaillants ne voulaient pas faire de coup d’Etat, mais cherchaient tout simplement à l’éliminer. Il est catégorique sur toutes ces affirmations. Mais tout cela, c’est des questions compliquées.

On ne peut y apporter de réponses sérieuses qu’à la suite de longues enquêtes approfondies et honnêtes. Or, toutes ces affirmations que fait le président, viennent juste quelques heures après la fin des coups de fusil.

A-t-il lui-même eu le temps de faire des enquêtes qui lui auraient permis par exemple de dire que ce n’était pas un coup d’Etat, mais une tentative d’assassinat dirigée contre sa personne ?

Supposons qu’il ait voulu mener lui-même une enquête, en a-t-il la compétence et le temps ?

Il faut avoir l’honnêteté et le courage de dire à nos compatriotes que cette supposée tentative d’assassinat, est un authentique montage du président Alpha Condé.

Leguepard.net : Même argumenté, ce que vous dites est grave. Le président aurait organisé ou fait organiser un attentat bidon. Alors, pour quel(s) intérêt(s) ?

M.B.S.S. : Pour commencer, je maintiens que le président Alpha Condé n’ignorait rien de cette mystérieuse tentative « d’assassinat ».

Sinon, comment aurait-il pu dire, de manière précipitée, sans aucune enquête sérieuse, qu’il s’agit d’une tentative d’assassinat dirigée contre lui, et non d’un coup d’Etat ?

Lui et son clan avaient déjà la liste préétablie de personnes (militaires et civiles) à incriminer.

La preuve ?-

Il avait fait diffuser une première liste de personnes à incriminer, juste une heure ou même une demi-heure après la fin des coups de fusil qui prenaient d’ailleurs un malin plaisir à l’éviter précautionneusement.

Je persiste donc à dire qu’on a bien affaire avec une manipulation politicienne de bas niveau, orchestrée par le président Alpha Condé lui-même. Alors, vous me demandez pour quels intérêts ?-

Il y en a plusieurs, compte tenu du contexte sociopolitique que le président a gravement altéré. Pour être bref, j’en citerai trois :

1°. Sur le plan interne, il peut faire d’une pierre deux coups, comme on dit couramment : anéantir les militaires qu’il soupçonne être proches de Sékouba KONATÉ ou de Moussa Dadis CAMARA. Et dans le même mouvement, discréditer les hommes politiques qui ne sont pas d’accord avec lui.

Il suffit de regarder la télévision publique, ou d’écouter la radio d’Etat pour comprendre que le plan établi d’avance avait juste besoin d’un prétexte pour entrer en application. D’où selon moi, cette mystérieuse attaque.

Des exactions militaires et policières, les routes barrées sur l’ensemble du territoire national, le chef d’état-major qui instaure de fait un état de siège à la grande satisfaction de son président, la confiscation de tous les moyens audiovisuels publics à des fins de propagandes comme au bon vieux temps de la « Révolution ».

Face à la confiscation des libertés fondamentales, toutes les notabilités de l’opposition restent invisibles et inaudibles, comme si pour eux, il était normal qu’un militaire, fut-il un général choisi par M. Alpha Condé, efface comme ça, d’un coup de micro les libertés fondamentales d’un peuple. Je suis intrigué par ce silence.

Si on était malveillant, on dirait qu’ils ne sont pas mécontents que M. Alpha Condé et son général réduisent notre peuple à une sorte d’esclavage mou.

Peut-être, feraient-ils pareil s’ils étaient aux affaires ?

2°. Sur le plan politique interne, organiser des législatives dont il préempterait les résultats. Car l’opposition ayant été préventivement éliminée, les fonctionnaires lui attribueraient plus que la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Or dans une élection libre et transparente, aucun Guinéen sensé n’imagine M. Alpha Condé et son parti obtenir plus de 10 à 12%, poids électoral personnel du président. La tyrannie légale pourrait alors s’installer en toute tranquillité. Le R.P.G., son parti a d’ailleurs commencé à se structurer en milice. Contre qui ?

3°. Au plan extérieur, en un certain sens, on peut dire que la machination du président a fonctionné. Il a obtenu qu’on condamne une tentative imaginaire « d’assassinat », prétendument dirigée contre lui. Il faut saluer ce détestable exploit. Mais il n’est pas certain que tous les chefs d’Etat étrangers aient été convaincus par les explications changeantes du président Condé.

Leguepard.net : Revenons un instant sur la campagne électorale présidentielle passée. Vous y avez participé de près. Le guépard a souvent publié vos réflexions relatives à l’ensemble du processus électoral. Qu’avez-vous retenu de cette campagne ?

M.B.S.S. :

– Première remarque : le premier tour a été relativement libre, si on s’en tient à la liberté de déplacement des différents candidats. Je ne parle pas du vote, je parle de la possibilité de mouvement laissé aux candidats.

-Deuxièmement, les résultats du premier tour ont été entourés d’une opacité absolue. Pour une raison simple : M. Alpha Condé étant éliminé dès le premier tour, il fallait falsifier les résultats sortis des urnes pour qu’il figure au 2ème tour. Ce qui fut fait par Sékouba KONATÉ, Jean-Marie DORÉ et Ben Sékou SYLLA, aujourd’hui décédé. Je rappelle encore les vrais résultats non falsifiés sortis des urnes : Cellou Dalein DIALLO (33%), Sidya TOURE (27%), Alpha CONDÉ (17%), peut-être moins.

-Troisièmement, il n’y a presque pas eu de 2ème tour. Le camp de Cellou Dalein était presque interdit de campagne électorale et de déplacement. Je vous renvoie à l’épisode de KANKAN, SIGUIRI, KOUROUSSA…où les PEULS, toute catégorie sociale confondue étaient obligés de se terrer dans leurs maisons, comme s’ils étaient dans un pays qui n’est pas le leur.

Une bonne partie avait d’ailleurs fuit vers le FOUTA, pour avoir la vie sauve. Tandis que, du côté de M. Alpha Condé, tous les moyens publics (radio, TV, argent de la banque centrale…) étaient disponibles. Tout cela m’a fait dire qu’au fond, M. Alpha CONDE était déjà coopté, et que l’élection n’était qu’une formalité visant à donner à cette pré-cooptation une apparence légale. Dans un certain contexte sociopolitique particulier, on peut comprendre que ceux qui sont en capacité de coopter quelqu’un, le coopte. Alors, à quelles conditions ?- Que la personne cooptée soit digne d’exercer la fonction pour laquelle elle est cooptée, qu’elle ait les qualités requises (vision, projet, rassembleur…). Personne ne peut dire que M. Alpha Condé remplisse ces conditions, au moment où il a été coopté, ou après sa cooptation.

Je maintiens donc cette position. Il n’y a pas eu d’élection, mais DÉSIGNATION par Sékouba KONATÉ et Jean-Marie DORÉ de celui qui était déjà coopté par des réseaux occultes, peut-être extérieurs à notre pays.

Leguepard.net : Toutes les manœuvres que vous venez d’évoquer, à supposer que ce soit vrai, expliqueraient-elles la mystérieuse tentative « d’assassinat » ?

M.B.S.S. : En Afrique Noire, tous ceux qui viennent au pouvoir par des manigances que je viens de décrire, en Guinée ou ailleurs, sont confrontés ou seront confrontés, à un problème de légitimité.

Les citoyens savent voter. Ils ont une conscience claire des bulletins qu’ils ont mis dans les urnes. Or à l’issue du scrutin, les résultats proclamés sont toujours à l’inverse de ce qu’ils ont mis dans les urnes. Il y a donc un problème.

Cela est si vrai que, même les militaires guinéens, à l’issue du premier tour, se sont étonnés que les votes qu’ils ont émis se soient trouvés ailleurs que chez le candidat pour lequel ils avaient voté. Une coordination militaire avait même sorti un manifeste invitant la Cour Suprême à s’acquitter honnêtement de sa tâche et non pas d’être agréable à Sékouba KONATÉ.

Au demeurant, le bénéficiaire des manipulations, M. Alpha CONDÉ pour le cas qui nous concerne, sait parfaitement qu’il occupe une fonction que ses compatriotes lui ont refusée par les urnes. À partir de là, sa préoccupation majeure, ne sera plus que de rechercher les moyens par lesquels il continuera de se maintenir au pouvoir contre la volonté de ses concitoyens. M. Alpha CONDÉ est très exactement dans ce cas de figure. Nos compatriotes aussi savent qu’il n’a pas été élu.

Du reste, les Guinéens n’ont aucune raison de choisir comme président de leur pays, quelqu’un qui, à 74 ans passés, n’a jamais vécu trois semaines consécutives dans le pays depuis ses quatorze ans. M. Alpha CONDÉ a passé plus de 60 ans en France.

Il n’est pas attaché à la Guinée, et il n’y a aucune attache. La fonction présidentielle et les avantages qui s’y rattachent l’intéressent, mais pas le pays. Alors objectivement, il n’y a aucune raison que les Guinéens votent pour quelqu’un qui n’a aucune attache dans leur pays.

Leguepard.net : Vous êtes sévère pour le président Alpha CONDE. Vous ne trouvez pas ?

M.B.S.S. : Non ! Pas du tout. Je suis attaché à la Terre de mes Ancêtres. Je considère que notre pays est pour M. Alpha CONDÉ, une opportunité comme un commerçant parlerait d’opportunité qui lui aurait été offerte pour profiter d’un avantage ou d’une situation. Le maintenir à la tête de notre pays contre toute vraisemblance électorale, c’est précipiter nos concitoyens dans la désespérance. Et les revendications régionalistes deviendraient alors légitimes et inéluctables. À terme, c’est la désintégration de notre pays. Je préfère le départ de M. Alpha CONDÉ à la désintégration de mon pays. J’invite nos compatriotes à y réfléchir.

Voilà selon moi, le plus grand danger qui guette notre pays, à brève échéance. Je préfère donc que M. Alpha Condé s’en aille ou qu’on le fasse partir, plutôt que de voir mon pays se désintégré. Oui, je préfère mon pays dans son unité au maintien de M. Alpha Condé au pouvoir.

Leguepard.net : Donc pour vous, le « Général » Sékouba KONATÉ aurait rendu un mauvais service au pays ?

M.B.S.S. : Absolument. Le général autoproclamé n’a pas rendu service à la Guinée. Il a trahi le pays. Ailleurs en Afrique Noire, de vrais militaires patriotes se seraient occupés de lui. Vous connaissez beaucoup de pays, même en Afrique Noire, où on s’autoproclamerait général, et dans la foulée nommer d’autres généraux et colonels.

J’en ai compté près de cinq cents en moins de neuf mois. Ça s’appelle du sabotage. M. Alpha CONDE n’a pas tort quand il dit que le « Général » Sékouba KONATÉ a pillé et désorganisé la Guinée.

Leguepard.net : Pourtant, il n’a forcé personne à lui confier la direction de la transition de notre pays. On a l’impression que les notabilités politiques se sont dérobées face à leur responsabilité. C’est peut-être pour cela qu’il a été proclamé Président de la transition. Vous-même, on peut vous mettre en cause. Vous vous êtes tenu éloigné des négociations de Ouagadougou. Pourtant, votre présence aurait été très utile. Vous ne trouvez pas ?

M.B.S.S. : Je ne cherche pas du tout à m’exonérer de ma part de responsabilité. Je l’assume. Sans vouloir me chercher des excuses, je n’avais pas le temps matériel de participer à ces négociations à Ouagadougou. Mais j’assume ma part de responsabilité.

Mais j’avoue qu’à plusieurs reprises, beaucoup de compatriotes (en Afrique, en Europe et aux U.S.A.) m’ont souvent demandé de créer mon propre parti. Mais ne voulant ajouter la pagaille à la pagaille, je leur ai expliqué que chacun de nous pouvait adhérer soit à l’U.F.R., soit à l’U.F.D.G. Et que, face à ces deux partis, à mes yeux les plus représentatifs du pays, créer un autre mouvement, c’est les affaiblir. Ce que je ne souhaitais en aucun cas.

Leguepard.net : Plus fondamentalement, n’y a-t-il pas en Guinée un problème de qualité du personnel politique ?

M.B.S.S. : Je ne partage pas tout à fait le fond de votre interrogation. Pour autant, je ne vais pas vous dire que l’ensemble du personnel politique de Guinée est génial. Ce serait stupide de le dire. Certains de ceux qui prétendent au pouvoir ont quelques qualités indéniables.

Tout à l’heure, vous sembliez regretter mon absence lors des négociations relatives à la transition, et il y avait une pointe critique dans votre question. Votre interrogation est judicieuse, mais embarrassante pour moi. Car je suis obligé d’admettre que votre objection est fondée.

Beaucoup de Guinéens de ma génération (à l’intérieur comme à l’extérieur du pays), du fait de n’avoir pas eu de visibilité politique et médiatique, se sont installés dans une modestie, à mon avis excessive. Or ce sont des personnes de grande qualité, mais totalement submergées par les contraintes quotidienne de survie.

On est donc dans cette situation paradoxale en Guinée, où des Agités intrigants, sans consistance d’aucune sorte, s’autoproclament représentants de ceci, de cela, ou même directeurs de la société civile, ou de syndicats sans syndiqués.

Leguepard.net : Que pensez-vous de ces innombrables partis et organisations de la société dite civile ?

M.B.S.S : Pas du bien. Ils posent deux problèmes : la représentativité des organisations collectives, et l’utilité même de leur existence en tant qu’interlocuteur crédible.

D’abord leur représentativité : la création de partis politiques est libre. C’est un droit fondamental. Il faut le conserver. Mais un parti existant n’est pas automatiquement représentatif. Dans notre pays, il n’y a pas plus de 4 partis représentatifs. Ce sont l’U.F.R., l’U.F.D.G. le R.P.G. et le PDEN de M. Lansiné KOUYATÉ.

Le reste, tout le reste est une simple affaire de sigles utilitaires qu’on cherchera à monnayer, je veux dire à vendre contre une fonction, par exemple directeur de projet, secrétaire général d’un ministère, ou même un ministère. Si on met de côté les quatre partis réellement représentatifs cités plus haut, les autres ne sont que des sigles dont la seule fonction est de procurer quelque avantage matériel à leurs propriétaires qui se font appeler président du parti. Cet avantage consisterait par exemple à se faire inviter par une ambassade, à obtenir moins difficilement un visa pour la France, ou encore à forcer la porte d’une négociation dans le but de faire nommer ministre. Cela s’est vu d’ailleurs à Ouagadougou, lors des négociations relatives à la transition.

Si M. Alpha Condé veut rassembler, comme il le prétend, c’est avec les partis représentatifs qu’il doit dialoguer, pas avec quelques arrivistes, même s’ils sont propriétaires de sigles auxquels ils appliquent abusivement le qualificatif de parti politique.

Leguepard.net : Sans rentrer dans les détails, pouvez-vous nous dire rapidement ce qui pour vous doit être le socle économique de notre pays ?

M.B.S.S. : puisque nous sommes pris par le temps, de mon point de vue, même si notre pays présente quelque intérêt sur le plan minier, nous devrions quand même nous orienter résolument vers l’agriculture vivrière et d’exportation. Je n’ai rien contre les ressources minières. C’est même un grand avantage d’en posséder sous ou sur notre sol. Mais l‘agriculture doit être notre priorité. Pourquoi ?

-Pour plusieurs raisons, entre autres celles-ci : d’abord notre pays est doté de tous les facteurs capables de faire émerger rapidement une puissante agriculture, des terres riches disponibles, une pluviométrie tout à fait satisfaisante.

C’est le secteur que tous nos compatriotes peuvent maîtriser, ceux des villes comme ceux des campagnes. Aucune zone urbaine de notre pays n’est située à plus de 10 km d’une ville.

Ensuite c’est l’activité économique qui nous permet d’occuper effectivement l’ensemble de notre espace territorial. En effet pour moi, c’est par l’agriculture que tous les Guinéens doivent devenir les propriétaires effectifs de la Terre reçue de nos Ancêtres communs.

Il ne faut pas se faire d’illusion. La question démographique va se poser à moyen terme et donc la question de l’espace territorial. Puisque notre pays est peu peuplé, relativement à l’étendue de notre territoire national, et que nous disposons de quelques potentialités intéressantes, si vous ajoutez à cela l’ouverture sur une large façade maritime, le plus naïf des Guinéens perçoit facilement les convoitises sur notre pays. Et ce ne sont pas forcément les convoitises extra-africaines auxquelles je pense.

Par exemple, je n’ai toujours pas compris les raisons pour lesquelles on a subitement nommé un général malien à la tête de la C.E.N.I. (Commission Electorale Nationale Indépendante) guinéenne, juste le temps qu’il proclame M. Alpha Condé « élu ». J’ai encore moins compris pourquoi les notabilités politiques directement concernées par l’élection présidentielle, ont accepté cette grossière entourloupe.

Je me suis laissé dire que certains chefs d’Etat sahéliens auraient d’immenses intérêts portuaires, agricoles et miniers dans notre pays. Et enfin, avec un minimum d’organisation, l’agriculture traditionnelle est à mesure de produire un surplus. Voilà. Sur le plan des mines, j’ai plutôt des inquiétudes.

M. Alpha Condé en a fait sa priorité, à mon avis pour des raisons qui lui sont personnelles et qui sont contraires à l’intérêt de notre pays. À propos de l’économie minière, j’ai dit qu’à mon avis, c’est exactement ce qu’on peut appeler « l’économie du chaos ».

Tous les vautours, indésirables ailleurs, sont en train de fuser sur notre pays, comme des rapaces s’abattent sur leur victime. C’est là l’un des plus grands dangers qui guettent notre pays.

Puisque nous n’avons pas le temps, j’exposerai plus tard les raisons qui justifient à mes yeux qu’on suspende, jusqu’à l’élection d’une vraie assemblée nationale, tout type de convention avec la Guinée dont la validité excède 4 mois.

Leguepard.net : Nous arrivons au terme de cet entretien. Leguépard.net a l’habitude de laisser le dernier mot à l’invité. Le votre M. SY SAVANÉ ?