Le médiateur de la République et la Constitution
Le médiateur de la République est une nouvelle institution prévue par la Constitution du 7 mai 2010. Son titre XI (« Du médiateur de la République ») précise ses fonctions :
« Article 127. Le médiateur de la République est un organe intercesseur, gracieux et indépendant, entre l’administration publique et les administrés.
Le médiateur de la République reçoit dans les conditions fixées par la loi, les réclamations des administrés, dans leurs relations avec les administrations de l’État, les circonscriptions territoriales, les collectivités locales, les établissements publics, ainsi que tout organisme investi d’une mission de service public ou à qui la loi attribue de telles compétences.
Article 128. Dans l’accomplissement de ses fonctions, le médiateur de la République n’est soumis ni aux directives, ni au contrôle de nulle autre personne ou autorité.
Article 129 Le médiateur de la République est nommé par le président de la République pour un mandat de sept ans non renouvelable, par décret pris en Conseil des ministres parmi les hauts fonctionnaires retraités ou non, ayant au moins trente ans de service. Il ne peut être démis de ses fonctions qu’en cas d’empêchement définitif ou de faute grave constatés par la Cour suprême.
Article 130. Le médiateur de la République ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions qu’il émet ou des actes qu’il accomplit dans l’exercice de ses fonctions.
Article 131. Les modalités de saisine, d’intervention, de fonctionnement du médiateur de la République sont déterminées par une loi organique ».
Il importe de rappeler son rôle et son mandat pour saisir comment la crise actuelle est à mille lieues de l’opportunité de nouveau départ qu’offre la Constitution.
Nommé pour jouer un rôle d’intercesseur entre l’administration publique et ses administrés, voici un homme qui mentionne des ethnies que la Constitution ignore. En effet, selon son premier article » La Guinée est une République (qui) assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, d’ethnie, de sexe, de religion et d’opinion ».
Le général Facinet Touré ignore le contenu de sa mission. Il s’est empressé de présenter ses excuses à ses « oncles Peul » après des propos qui ont suscité une réprobation unanime de la presse et des citoyens guinéens :
« J’ai dit que les peulhs ont le cordon de la bourse et le pouvoir économique…Mais pour la quiétude sociale, les peulhs n’ont qu’à se contenter de ça et laisser les autres ethnies se partager le reste. Si les peulhs ont le pouvoir économique et que les autres ethnies se partagent le pouvoir politique, il y aura la stabilité dans ce pays. Dans le cas échéant, la paix ne tiendra pas plus de deux jours ».
Il doit présenter ses excuses à la Nation entière, pour bafouer sa Constitution et révéler à tous à quel point il se soucie peu des administrés. Chargé de traiter de questions administratives, il se prononce sur des questions politiques qui n’ont rien à voir avec son mandat.
Ses excuses prononcées, il ne restera au général qu’à faire une chose pour sauver le peu qu’il reste de son honneur : démissionner.
Une nomination hâtive
On ne peut omettre de rappeler que la nomination de deux médiateurs de la République en moins d’un an met en péril la légitimité de la fonction. Le 23 octobre 2010, le général Sékouba Konaté, alors président de la République par intérim nomme le Dr. Sékou Goureissy Condé par décret. Le 7 janvier 2011, le général Facinet Touré est nommé par le Président Alpha Condé.
Selon la Constitution, le médiateur est nommé « parmi les hauts fonctionnaires retraités ou non, ayant au moins trente ans de service ». On peut supposer que la probité de l’individu et les services rendus à la Nation constituent des critères à prendre en compte avant de procéder à toute nomination. Force est cependant de constater que le général Facinet Touré n’offre pas ses garanties.
Nommé à la hâte, alors que d’autres candidats auraient assurément été plus consensuels et respectables, le général Facinet Touré s’est illustré par une incompétence, un esprit partisan et une propension aux intrigues politiciennes qui le disqualifient.
Les citoyens Guinéens sont en droit d’attendre que les nominations à des fonctions si cardinales soient prises avec toute la prudence et le sérieux que requiert la gestion de la chose publique. Les déclarations intempestives et partisanes du général Facinet Touré ont le mérite de montrer que le candidat est incapable d’assumer son poste. Le Général Facinet Touré doit démissionner.
L’absence de prise de fonction d’une figure partisane
Le général Facinet Touré disait le 20 mai ne pas encore être « médiateur » et ne pas avoir pris ses fonctions. On s’interroge dès lors sur la pertinence de ses missions à l’étranger (Sénégal, Mali, Burkina Faso), lesquelles étaient sans rapport avec sa mission qui suppose la réception des réclamations des administrés.
Quel crédit porter à un individu qui quitte son pays sans avoir pris fonction mais utilise son mandat à l’étranger pour des entretiens avec des officiels sans rapport avec sa mission ?
Il est vrai que la Guinée ne dispose pas encore de loi organique précisant les » modalités de saisine, d’intervention, de fonctionnement du médiateur de la République », comme prévu dans l’article 131 de la Constitution.
Mais comment un homme ignorant tout du service public peut-il être à la tête d’un « organe intercesseur, gracieux et indépendant » ?
Ses qualités lui font défaut, il en a convenu en présentant ses premières excuses. Pour s’épargner un ridicule inconvenant pour une personne de son âge, et permettre à la dignité de la fonction d’être mise au service des administrés guinéens, il reste au Général Facinet Touré la possibilité de poser un acte courageux et responsable : démissionner !
Faute grave : démission
L’article 129 de la Constitution pose que le médiateur de la République » ne peut être démis de ses fonctions qu’en cas d’empêchement définitif ou de faute grave constatés par la Cour suprême ».
Il importe que la Cour suprême (« Cour Constitutionnelle » selon la Constitution) se saisisse de cette « faute grave » et prononce la démission du Général Facinet Touré. L’article 93 de la Constitution fait de cette instance » l’organe régulateur du fonctionnement et des activités des pouvoirs législatif et exécutif et des autres organes de l’État ».
Quand bien même le Général Facinet Touré démissionnerait avant qu’elle ne se prononce, la Cour suprême doit constater la « faute grave » du médiateur de la République et jouer son rôle d’instance régulatrice.
Pour que la transition guinéenne suive son cours, nous avons besoin d’une administration au service des citoyens auxquels elle offre un recours dans la personne du médiateur de la République. La réforme de l’administration est un chantier majeur et délicat. Il requiert des personnes sages, expérimentées et animées du service public. Le Médiateur doit être à leur image : Général Facinet Touré, nous vous saurons reconnaissant de bien vouloir démissionner.
Conakry-Dakar-Paris-Bruxelles-NewYork
Le 28 Mai 2011
28 septembre 1958, mouvement citoyen
Refonder l’unité nationale sur un projet politique moderne et démocratique
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