Monsieur le président !
J’ai écouté avec enthousiasme vos dernières déclarations sur le développement de la crise guinéenne…
Enthousiasme ! Parce que, M. le président, vous avez tendance à adopter un autre ton de langage. Ou du moins, vous commencez à raisonner. Vous vous rendez compte, que votre piège de diviser l’opposition, est un échec. Que votre tentative de couper l’herbe sous les pieds à l’opposition – en fixant unilatéralement la date des élections législatives – n’a pas été concluante. I Vous comprenez du coup, qu’être au pouvoir est important, mais dans la stabilité.
Je me réjouis quand vous dites que « la seule voie pour une démocratie durable et réussie, est de s’assurer que tous aient l’opportunité de participer à des élections libres et transparentes ». Autrement dit, vous êtes d’accord avec moi, que l’objectif ultime de tous les efforts de démocratisation estla consolidation de la démocratie.Une démocratie est dite consolidée, c’est quand toutes ses institutions sont amplement acceptées qu’aucun secteur important de la société est disposé à y mettre des doutes. Nous devons tous nous convaincre jusqu’à ce que la démocratie soit « theonly game in the town », comme disent certains politologues anglo-saxons. C’est-à-dire, quand aucun citoyen ne se projette que les règles du jeu politique soient autres que celles de la démocratie.
Et comme pour être en accord avec vous-même, M. le président, vous dites aussi qu’en « Guinée, personne ne doit être victime du fait de ses origines ou de ses opinions ». « C’est le sens de tout mon combat », avez-vous ajouté. Sur ce point, j’admets que vous devez fournir des efforts. Qu’aucun guinéen ne soit victime de ses origines, et que cela soit le sens de votre combat, M. le président, vous avez la grande responsabilité de le démontrer sur le terrain. Car sur le terrain, et incontestablement, une communauté est bien victime des exactions de toute sorte. L’ethnie peulh.
En fin, M. le président Alpha Condé, vous le savez autant que moi. La politique est le processus par lequel les communautés poursuivent des objectifs collectifs, et abordent leurs conflits dans le cadre d’une structure de règles, de procédures et des institutions, avec l’objectif d’atteindre des solutions et d’adopter des décisions applicables par l’autorité de l’Etat à l’ensemble de la société. Cependant, M. le président, il faut oser le dire, que depuis votre arrivée au pouvoir en 2010, vous dirigez le pays de travers.
Vous êtes le premier président civil démocratiquement élu en Guinée. C’est un grand pas. Et comme dit l’autre, « être le premier à faire quelque chose suppose déjà 50 pour cent de réussite ».
La balle est dans votre camp M. le président. Organiser les élections législatives à la date du 30 juin, ne répond pas aux objectifs collectifs de toute la société guinéenne.
Avec mes salutations distinguées.
Naby Laye Camara
Bruxelles