L’entretien d’Alpha Condé sur RFI le 19 Juillet 2011 (les titres en italiques en constituent la teneur), est truffé une nouvelle fois de contradictions, et permet de comprendre la « manipulation » liée à la tentative d’attentat dont il dit avoir fait l’objet, et que je me propose d’illustrer ici…
Inutile de rappeler que la résidence du président du RPG, aurait été la cible dans la nuit du lundi 18 Juillet au mardi 19, de tirs à l’arme lourde, tout le monde le sait.
Comprenons-nous bien : de même que de nombreux internautes, dont je fais partie, dénoncent sans relâche les violations des droits de l’homme, les violations de la constitution, les atteintes à l’état de droit …, de même il faut dénoncer par principe, toute tentative violente d’obtention du pouvoir. Les coups d’État sont à bannir définitivement, les tentatives d’assassinats, d’où qu’elles viennent sont à proscrire. Sur le principe, je me mets donc à l’unisson de tous ceux qui condamnent ce genre d’actes ignobles, s’il est avéré.
On espère donc que les vrais coupables (pas ceux désignés par le seul pouvoir) seront traduits devant la justice, et qu’aucune chasse aux sorcières ne sera utilisée pour menacer, arrêter ou condamner des victimes innocentes. Malheureusement au vu de ce qui suit, il n’y aucune raison d’être optimiste, et on en vient même à douter (certains l’ont fait explicitement) de la réalité de cet attentat.
Les invraisemblances et incohérences sur la tentative d’assassinat
« Ma chambre a été attaquée au bazooka et la roquette RPG7 ; il y a eu des tirs extrêmement nourris mais la Garde présidentielle s’est très bien défendue pendant plus de deux heures avant l’arrivée de renforts… malheureusement j’ai eu un mort et un blessé dans ma Garde » a déclaré Alpha Condé au cours de cet entretien.
Tout le monde sait que le bazooka et le lance roquettes sont capables en un seul tir d’exploser un char d’assaut blindé. Une simple maison ne résiste donc pas à un tir de roquettes. A entendre Alpha Condé, pendant plus de deux heures, des militaires entraînés – on suppose que s’ils disposent d’une arme, c’est parce qu’ils savent s’en servir – n’ont pas été capables de prendre possession d’une maison (et non d’un camp militaire), voire même de toucher de manière significative la maison. Les rares photos que j’ai pu voir, m’ont fait rire jaune, si ce ne sont les conséquences qu’elles occasionnent, et qui constituent la raison d’être d’ailleurs de cette mascarade.
Honnêtement n’importe quel individu est capable d’exploser en un seul tir, la maison et son contenu (en l’occurrence les personnes qui s’y trouvaient). S’il n’y avait pas mort d’homme, on irait même jusqu’à se demander si ce dernier n’est pas décédé d’une crise cardiaque, d’une mauvaise manipulation ou par accident. En effet, en deux heures de temps de tirs nourris, un mort (non militaire) est à déplorer (tant mieux qu’il n’y en ait pas davantage), mais cela semble surprenant. En outre les quelques trous de balle ne sauraient rendre compte de deux heures de tirs nourris. En Europe, un braquage de banque inférieur à 15 mn, compte plus d’impacts de balles, que ce que j’ai pu voir sur les murs de la résidence en question. Il est donc vraisemblable que les assaillants soient des incapables notoires, ou ne soient armés que de d’armes légères. Mais en avouant l’inexistence d’armes lourdes, on remet en cause l’existence de cet attentat, et on en viendrait presque à imaginer un huis clos préalablement mis sur pied, entre partisans, les personnes arrêtées et mises au secret, ne pouvant par définition, pas parler.
En effet, personne n’a été arrêté au moment des faits, mais dans le noir, la garde présidentielle a quand même reconnu tous les responsables et complices de cet acte !!! La preuve, la vitesse à laquelle les responsables (déjà coupables ?) et complices (comment sait-on qu’il en existe ?) ont été arrêtés dès le lendemain. On aimerait que ce zèle ait été aussi efficace pour trouver les empoisonneurs, les meurtriers du 28 Septembre, ceux de Zakariou Diallo, ceux de Mamadou Alpha Diallo, et tant d’autres…. Bref tout cela ressemble à des résultats sélectifs et orientés !!!
« Comme on avait arrêté des gens dans la journée – (le lundi) – avec des armes et des tracts – il y a eu beaucoup d’arrestations – par précaution je n’ai pas dormi dans ma chambre ».
Bizarrement, le fait d’arrêter des gens préventivement (pourquoi ?) pousse Alpha Condé à ne pas dormir dans sa chambre, mais dans la chambre d’ami ? S’il craignait pour sa vie, on a du mal à imaginer les risques pris à rester chez lui. Changer de chambre a donc été une superbe protection. Peut-être sont-ce ces arrestations qui ont permis d’avoir quelques renseignements et de prévoir cette mini-attaque. Tous les témoins n’ont rien vu, mais tout entendu ???
Honnêtement une roquette détruit tout sur son passage, et ne fait pas de distinction entre les pièces !!! Alpha Condé est tranquille, en changeant de chambre, dont il dit qu’elle a été la cible (presque unique) des tirs, il n’a plus de quoi être inquiet.
On remarque également au passage que les arrestations préalables (pour quelles raisons ?) n’ont pas fait l’objet de publicité (seuls quelques sites ont parlé de quelques arrestations, mais on nous dit qu’elles ont été nombreuses !!!), ce qui signifie qu’on arrête quotidiennement en Guinée « démocratique », et sans informer la population.
Peut-être que ces arrestations ont consisté à arrêter de vrais spécialistes susceptibles de réussir un coup, et on a laissé les bras cassés aller se jeter dans la gueule du loup. Nos militaires ne sont pas des lumières, mais quand même, on peut imaginer qu’ils connaissent au moins leur métier, sinon c’est à désespérer, et… on doit les licencier sur le champ, ce qui soulagera nos finances publiques.
« Il y a eu des échanges de tirs pendant que l’Ambassadeur de France était présent, et il a même été contraint de se coucher à terre pour ne pas être atteint par les balles ».
On comprend mieux pourquoi la maison n’a pas explosé. Il fallait un témoin de choix pour « l’attentat », mais les dégâts devaient être compatibles avec la survie des témoins et du principal intéressé. Il faudrait interroger l’Ambassadeur pour avoir son avis sur les évènements. L’Ambassadeur a t-il passé la nuit chez Alpha Condé, ou est-il venu le matin ? (à quelle heure ?). Et dans ce dernier cas, cela signifierait, que des tirs ont recommencé, malgré l’arrivée des renforts. Il y a plein de contradictions et des zones d’ombre, qui gagneraient à être éclaircies. A t-on refait le film pour avoir un témoin de poids, mais dans ce cas….
Ce n’est « pas un coup d’État parce qu’ils n’en ont pas la capacité… surtout que l’armée républicaine a immédiatement occupé la radio et pris le contrôle des points centraux avant de venir renforcer la garde présidentielle ».
On constate ici, qu’il n’y avait pas péril en la demeure, puisqu’il a été demandé à l’armée de faire certaines choses plus urgentes, avant de venir prêter main forte aux assiégés. On constate également un brin d’arrogance, à prétendre que certains militaires n’ont pas la capacité de renverser le régime (a t-il oublié Avril 1984 et Décembre 2008 ?). Les militaires français ont-ils été sollicités, vu la présence de leur patron à la résidence d’Alpha Condé ?
Par ailleurs comment expliquer que l’un des responsables présumés de cette tentative d’assassinat (le général Nouhou Thiam ?), attende chez lui sereinement qu’on vienne le cueillir ? A quelle heure a t-il été arrêté d’ailleurs, il y a débat sur la question ? De même, tous ceux qui n’ont pas été arrêtés la nuit, ni même le matin, s’ils sont revenus faire une deuxième représentation à l’attention de l’Ambassadeur de France, sont restés tranquilles chez eux. En matière militaire, les règles du jeu sont pourtant claires. Lorsqu’on fait un coup d’État c’est pour le réussir, sinon sauve qui peut, car il n’y aura pas de pitié (se rappeler Juillet 1985 par exemple). On a donc du mal à comprendre comment des militaires, sont restés chez eux tranquillement, connaissant ces règles du jeu guinéennes !!!
A qui profite ce pseudo-crime ?
Chacun aura pu apprécier la magnanimité du président du RPG, indiquant que ceux qui avaient voulu l’assassiner seront simplement enfermés, car la peine de mort n’existe pas en Guinée. C’est sans doute ce que croyait Zakariou Diallo. Il est donc plus dangereux en Guinée de jeter un caillou sur une voiture (en admettant que Zakariou ait été l’auteur d’une telle action) car on y perd la vie, que de tenter d’assassiner le chef de l’État où l’on ne risque que la prison. De qui se moque t-on ?
Sans doute, certains lecteurs se rappellent, un texte que j’avais écris et où je rappelais la technique du salami. Je crois que nous y sommes.
Système de consolidation du pouvoir étrenné par Joseph Staline, expérimenté dans les ex « démocraties populaires » (et en Guinée par Sékou Touré), cette technique consiste à s’appuyer sur ses partisans et ses alliés pour éliminer ses ennemis (généralement situés aux extrêmes sur l’échiquier politique), puis à éliminer progressivement ses soutiens, puis même ses proches (ceux qui l’ont aidé à conquérir le pouvoir par exemple) afin de rester seul. Une fois seul, il suffit de nommer des gens incultes, sans expérience et surtout à qui on ne doit rien, mais qui en revanche sont redevables au chef de leur position, ce qui conduit invariablement à une dictature personnelle.
Les militaires favorables aux généraux Conté et Konaté, et au capitaine Dadis Camara ne font partie des soutiens du régime (selon Alpha Condé), ainsi que l’opposition politique, et notamment l’UFDG. Ils sont donc dans la ligne de mire.
Au nom de quoi Alpha Condé est-il le seul à décider qui sont les bons ou les mauvais militaires ? Il y a de quoi rire jaune de voir des militaires tranquillement chez eux (s’ils sont coupables, ils auraient du fuir) et donc considérés comme de mauvais militaires, arrêtés par des criminels, tels Tiegboro Camara et Pivi, considérés eux comme de bons militaires. On marche sur la tête.
Pour répondre à la question préalable, on constate que pour quelques trous dans une maison, fortement médiatisés (ce qui est une grossière erreur par rapport à ce qui a été dit, mais la honte ne tue pas en Guinée), tout est permis au président du RPG, des arrestations arbitraires, y compris parmi les civils (même des mineurs ont été gardés à vue), des saccages de maisons de civils (personne ne se pose la question pourquoi, parmi les partisans du président du RPG, sans doute considèrent-ils cela comme normal), ou d’entreprise de presse (le journal « le Défi » déjà suspendu pour avoir critiqué Facinet Touré, par exemple).
Enfin, le nec plus ultra, voit l’intervention du CNC, pour « interdire amicalement » aux journalistes de contester la réalité de l’attentat, en s’abstenant de tout commentaire qui pourrait mettre de l’huile sur le feu. On a vu que les déclarations – parfois incendiaires – d’Alpha Condé sur RFI, ne dérangeait pas le CNC. On se demande pour qui travaille le CNC ?
Finalement cette mascarade permet de neutraliser tous les militaires qui lui sont – en apparence – défavorables, mais également d’intimider et de harceler certains membres ciblés de l’opposition, comme si ces derniers avaient à voir avec cette mascarade.
Fort du soutien international – qu’on ne s ‘y trompe pas toutefois, la diplomatie y oblige, indépendamment de ce que pensent les uns et les autres – et même national, Alpha Condé se croit tout permis.
Les véritables buts de cette mise en scène :
Bien sur, si on se place du point de vue des mutins, on peut imaginer que la fin de certains privilèges annexes (en dehors des avantages en nature et salariaux) a motivé leur initiative. On a du mal à imaginer, que les arrestations préventives la veille de l’attentat, n’aient pas fourni d’informations permettant de gérer calmement les incidents du lendemain.
Par ailleurs, ce qui est étonnant est qu’aucun responsable de la sécurité du PRG n’ait été sanctionné. Si de vrais mercenaires avaient planifié ce coup, nul doute qu’ils auraient réussi, et ce ne sont pas les renforts arrivés deux heures après qui l’auraient empêché. Bizarrement, tout le monde trouve normal que la sécurité du PRG ne soit pas assurée, et personne n’est responsable. Seuls ceux qui auraient attenté à la vie du PRG sont poursuivis. Bizarre, bizarre …
a) éliminer, disqualifier, intimider et harceler ses adversaires
Dans l’immédiat, il s’agit de mettre à terre, ceux qu’Alpha Condé appelle « nos ennemis ». Depuis quand la Guinée possède des ennemis ? Depuis 1958, la Guinée n’a jamais été en guerre contre ses voisins, elle n’a donc aucun ennemi. Si l’on excepte les tensions liées aux conflits au Liberia et en Sierra Leone au début des années 2000, que les Foday Sankoh et Charles Taylor ont voulu exporter, pour leurs propres intérêts de survie de leurs régimes et/ou pour les diamants, et non par inimitié avec la population guinéenne, la Guinée n’a jamais eu d’ennemi. En revanche, les régimes politiques, voire leurs leaders ont pu en posséder. Aussi lorsqu’Alpha Condé parle de ses ennemis (je ne lui connais que des adversaires politiques, mais pas d’ennemis), il transpose ses propres délires, à sa population partisane. Et dire que certains osent prétendre, qu’il est en recherche de paix et de réconciliation. Quelle fumisterie !!!
« On va voir maintenant où sont les commanditaires. Vous savez qu’il y a eu beaucoup de discours violents… bien sûr, il y avait des officiers,… mais il n’y a pas qu’eux ».
Si l’on excepte le colonel Moussa Keita qui n’a pas prononcé de discours, mais réalisé une entrevue, seule l’opposition politique a émis quelques discours. Chacun remarquera la technique du miroir, consistant à accuser les autres de ce que l’on fait soi-même. De nombreux RPGistes en sont friands, formés qu’ils sont à ces techniques, souvent imparables. Il faut en effet rappeler la violence du discours d’Alhassane Condé prétendant reprendre le recensement, en violation flagrante de la constitution, et les éventuelles réponses de certains leaders politiques ne l’acceptant pas. Bien que la provocation émane d’Alhassane Condé, ce sont les opposants qui sont violents… dans leurs réponses, selon Alpha Condé.
Alpha Condé indique ici, que les commanditaires de son attentat sont des civils. Autrement dit, il lui faut commenter la pièce qu’il a réalisée – on devrait lui décerner un oscar -, mais que tout le monde n’a pas compris, en précisant qu’il existe des civils qui sont derrière tout ça – lui les connait forcément, en tant qu’auteur du scénario.
Extrait de l’entretien de RFI
RFI : Dans votre première prise de parole ce mardi matin, vous avez dit « je ne veux pas de réaction populaire ni de réaction contre qui que ce soit ». Craignez-vous que vos partisans exercent des représailles contre telle ou telle communauté ?
Alpha Condé : « Pas mes partisans, mais les communautés… parce que les gens arrêtés appartiennent à une certaine communauté, je ne veux pas que les autres réagissent. Donc j’ai déployé l’armée dans les cinq communes pour empêcher toute réaction populaire…. ceux qui tirent sont des militaires. Mais il y a leurs complices civils. Certains de ces complices ont été arrêtés aussi… encore une fois, je ne veux pas qu’il y ait de problèmes entre les communautés en Guinée ».
De quelle communauté s’agit-il puisque les personnes arrêtées ou recherchées s’appellent Nouhou Thiam, Ousmane Keita, Morlaye Soumah, Alpha Oumar Barry, Tidiane Camara, Saa Alphonse Touré, Sidiki Camara (surnommé de Gaulle), Cheick Ahmed Tidiane Camara, Mamadouba Bondabon Camara, Chérif Diaby, Kémo Condé, Aidor Bah, Sadou Diallo, Moussa Traoré…
Il y a des imbéciles, pour penser que si Alpha Condé ne s’en était pas sorti, il y aurait eu la guerre civile. Mais avec qui ? Lorsqu’on regarde la liste des personnes arrêtées, que peut-on en conclure ?
Quel est le but réel d’indexer une communauté ? Sinon de préparer le terrain ultérieur. Il est étonnant qu’en étant resté cloitré dans sa résidence, Alpha Condé soit capable de connaître tous les rebelles potentiels (civils y compris) susceptibles d’attenter à sa vie. Ah j’oubliais, il est producteur, réalisateur, et même acteur (le premier rôle) de cette pièce. Il en connait donc les personnages importants, les seconds rôles et même les doublures (l’officier soigné au Maroc – Oumar Keita – n’ayant pas voulu le rôle principal, ni aucun rôle d’ailleurs !!!), y compris la fin de l’histoire. Bizarrement, beaucoup la subodorent, étonnant non !
Étrangement le déploiement militaire se fait sur Kipé, donc la commune de Ratoma (Coza, Bambetto…) au sens large, si vous voyez ce que je veux dire, ce qui eût été différent, si cet attentat avait eu lieu au Palais présidentiel (ce n’est sans doute pas une coïncidence).
Enfin des arrestations illégales ont eu lieu préventivement (pourquoi ?) et discrètement au sein de l’UFDG (Baba Alimou Barry, le président des jeunes de l’UFDG à Coza et son oncle par exemple). On recherche Bah Oury. Pour quelle raison ? Laisserait-on sous-entendre qu’il avait un rôle à jouer dans la pièce d’Alpha Condé ? Si c’est le cas, on lui a forcé la main, et on le force à jouer un rôle qui n’est pas fait pour lui. Pourquoi avoir saccagé sa maison ? C’est quoi une armée républicaine à la lumière de ces agissements ? Pourquoi l’arrestation des enfants de Cellou Dalein Diallo ?
Alpha Condé va sur la mauvaise pente, car à force de tirer sur la corde, ses ennemis supposés vont réellement le devenir, et il risque de se rendre compte qu’au XXIème siècle, la force n’est qu’un moyen parmi d’autres, mais en aucun cas la plus efficace.
b) les élections
Ce scénario poursuit des objectifs différents, dont le plus important, on vient de le voir, est la neutralisation, l’élimination de ses adversaires politico-militaires, mais celui lié aux élections est tout aussi important.
« Je vais faire un discours pour demander que l’on discute avec tout le monde. Il faut que l’on se mette d’accord sur la révision de la liste électorale… mon souci c’est l’unité du pays et la réconciliation… j’ai annoncé que l’on allait faire la révision de la liste électorale. J’ai appelé le ministre de l’Administration du territoire à rencontrer tous les partis politiques et mouvements sociaux. Il faut que tout le monde s’asseye autour d’une table pour trouver un minimum de consensus pour la révision de la liste électorale ».
Cette péripétie comme il le dit lui-même, ne lui fait pas perdre de vue l’essentiel. L’important est que toute l’opposition, notamment celle qui avait refusé de discuter avec le gouvernement, le fasse maintenant. L’ennui, c’est que les conditions pour lesquelles l’opposition avait refusé, n’ont pas changé. L’opposition n’accepte pas que le MATD s’implique dans des élections pour lesquelles, il n’est éventuellement que le maître d’oeuvre, alors que c’est la CENI qui en est le maître d’ouvrage. Une fois de plus Alpha Condé propose la même chose. Compte t-il sur l’émotion suscitée par cet événement (artificiel) pour mettre la pression sur l’opposition, ou veut-il profiter de l’élan de sympathie suscités par les naïfs, pour faire croire que c’est l’opposition qui refuse la main tendue ?
Il n’y a d’ailleurs pas de main tendue, il n’y a qu’un ultimatum : il faut obligatoirement rencontrer Alhassane Condé (le lendemain ?), pourtant incompétent (au propre et au figuré). Ce dernier n’a d’ailleurs pas amélioré sa communication et son QI : « Est-ce que ce ne sont pas des gens même qui sont opposés aux élections qui sont en train de perturber, d’empêcher que les Guinéens avancent », a t-il déclaré à propos de ces évènements. Quel malhonnête !
Chacun remarquera également au passage qu’Alpha Condé est pour « l’unité du pays et la réconciliation ». Eu égard à son discours précité, on peut en douter.
« J’ai déployé l’armée dans les cinq communes pour empêcher toute réaction populaire…. Donc nous allons faire en sorte qu’il n’y ait aucune manifestation populaire, ni de soutien, ni rien… ».
En fait, tout est dit dans cette phrase : en procédant de la sorte, Alpha Condé met des militaires dans la rue – si possible sur une large ceinture autour de Kipé, lieu de l’attentat (coïncidence sans doute) – pour tenter de prévenir les marches pacifiques qui devaient avoir lieu contre la reprise du recensement. Sa proposition de dialogue, ne respecte toujours pas la constitution. Il se présente vis-à-vis de la population, qui ne comprend pas ces nuances, comme un homme de dialogue, et la population constatera le rejet de cette proposition par l’opposition. Il veut donc montrer que c’est l’opposition qui est opposée au consensus qu’il propose.
En conclusion
Alpha Condé est fier de l’armée guinéenne, pas moi. Il faut donc qu’il assume ses choix, promouvoir des criminels et accepter que ces derniers se retournent contre lui. 50 000 personnes (soit 0,5% de la population) absorbent 30 à 50% du budget (selon la présentation qui en est faite) sur les 10 millions de personnes. Officiellement, il reste des militaires proches du général Conté, même si certains sont emprisonnés depuis le CNDD (le sont-ils toujours et pourquoi, dans l’affirmative ?). D’autres sont proches du général Konaté, sans être ralliés à Alpha Condé (Nouhou Thiam par exemple). Ils sont aujourd’hui arrêtés sans que cela suscite trop d’indignation. Enfin, ceux qui sont fidèles au capitaine Dadis Camara (le colonel Moussa Keita par exemple, toujours illégalement emprisonné, malgré le règlement militaire appliqué arbitrairement et aléatoirement) subissent le même sort.
Alpha Condé s’imagine que parce que tout le monde a condamné sa tentative d’attentat (et c’est normal) y compris les institutions internationales (c’est le moins qu’elles puissent faire), cela lui permet de faire n’importe quoi, y compris arrêter les membres de la famille de Cellou Dalein Diallo. Pour qui connait ce dernier, et son rejet de la violence (son acceptation d’élections pourtant non crédibles en constitue un acte – et non une déclaration – concret), Alpha Condé se rend ridicule.
Bien sur dans l’immédiat, l’opinion publique guinéenne dont la docilité aux mots d’ordre et la crédulité sont un sujet permanent de surprise, accepte indéfiniment les informations les plus tendancieuses et fausses.
Mais au-delà de cette péripétie, les problèmes pendants restent les mêmes : le recensement anti constitutionnel ou la révision qui n’en est pas loin, les problèmes au Ministère de l’agriculture, les problèmes d’électricité… sans compter les problèmes récurrents liés au pouvoir d’achat.
Une fois la péripétie évacuée, chaque Guinéen se trouve confronté aux mêmes problèmes qu’auparavant… et il en sera toujours ainsi, tant que le gouvernement ne s’y attaque pas de front. Si Alpha Condé compte amuser la galerie avec ses films de série B, il risque de lasser les spectateurs, qui finiront par demander de vrais films avec de vrais acteurs, car les problèmes qui intéressent la population ne sont pas liés à ceux qui intéressent Alpha Condé, sa consolidation du pouvoir.
Gandhi, citoyen guinéen
« Dans tout État libre, chaque citoyen est une sentinelle de la liberté qui doit crier, au
moindre bruit, à la moindre apparence du danger qui la menace ». (Robespierre, Discours
sur la liberté de la presse, Mai 1791).