Comme beaucoup de guinéens, j’ai parcouru le livre Entretiens de M. Alpha Condé qui m’a beaucoup indigné. C’est un ouvrage fait de contre-vérités et de demi-vérités, ne répondant à aucune des questions que se posent les guinéens.
Peut-être, pense t-il que des générations
de témoins ayant disparu, la vérité sur sa famille et son parcours personnel
échappe désormais à la connaissance du public. Plus que ce que nous décline M.
Alpha Condé, je suis révolté par la complicité de deux universitaires (Albert
Bourgi et François Soudan) qui, volontairement se sont livrés dans
l’impertinence pour accréditer des fariboles.
– Sur la famille du président de la république : Nul doute que son père est
venu de la Haute Volta avec le gouverneur Paul Cousturier, dans la première
moitié des années 1930 pour être le cuisinier de ce dernier ; ce qui n’a rien
de dévalorisant. Oui, il avait le statut de fonctionnaire dès lors qu’il
émargeait à la fonction publique et payé par le trésor. Contrairement à ce
qu’affirme Mme Doussou Condé, ce n’est pas le gouverneur Georges Poiret qui l’a
emmené chez nous, celui-ci ayant quitté la Guinée française en 1925. S’agissant
de son affectation à Boké, Madou Condé le père d’Alpha Condé, voulait devenir
interprète au tribunal de Conakry quand le gouverneur Cousturier a été rappelé
en métropole. Ce dernier ayant jugé qu’il ne pouvait pas travailler là
puisqu’il ne maîtrisait pas la langue soussou, a préféré lui faire une lettre
de recommandation auprès du commandant de cercle de Boké. C’est celui-ci qui
l’affecta au service de l’état civil dont le chef de bureau n’était autre que M.
Alpha Ndiaye ; le président de la république porte son prénom.
– « Mon père était très proche de la communauté soussou et avait pris une
seconde épouse dans la région », écrit-il, mais Alpha Condé ne décline pas
l’identité de cette femme ; elle s’appellerait Hawa Sanden Coumbassa. Elle est
guinéenne. Par contre, la première épouse de son père s’appelle Saran Camara.
Elle est malienne de Siby. Pendant la campagne présidentielle de 2010, le
candidat Alpha Alpha Condé avait fait répandre l’idée que sa mère est soussou.
Alors, qui de ces deux femmes serait la mère biologique d’Alpha Condé ? Son
père a pris sa retraite à Conakry, à Libraport où il a servi de planton au
directeur de cette société d’état à l’époque, qui était connu par son sobriquet
de Bah Libraport ». Sentant le poids de l’âge, il est retourné au Burkina Faso,
à Banfara son village d’origine, où il est effectivement enterré.
– De ses années d’agitation politique : Faut-il faire remarquer que jusqu’en
1964, l’étudiant Alpha Condé venait régulièrement en Guinée auprès de sa
famille pour y passer ses vacances. Or, pour qui connaît l’histoire tumultueuse
de la Guinée indépendante, l’état guinéen avait coupé la bourse de tous les
étudiants en France au lendemain de la grève des élèves et enseignants, en
1961. Ceux qui sont rentrés en Guinée ne sont plus revenus en France ou sont
allés poursuivre leurs études ailleurs. Quelles étaient les accointances de M.
Alpha Condé avec le régime du PDG ?
– Dans son livre, il évoque l’agression portugaise du 22 novembre 1970, non
sans égratigner Siradiou Diallo qu’il présente comme un agent des services du
renseignement français. Celui-ci n’est plus en vie pour se défendre devant une
accusation aussi grotesque. Mais, j’ai bénéficié de l’amitié et la confiance de
Siradiou pour aborder tous ces sujets à Paris en 1992, dans le bureau même de
François Soudan à Jeune Afrique, alors qu’il venait de lancer son parti, le
PRP. Je rappelle au passage que Siradiou Diallo a été embauché par cet organe
de presse le 02 mai 1970. Il était un jeune homme de 35 ans, me confia t-il. Né
en 1935 au lieu de 1936 comme l’atteste sa biographie, il avait beaucoup
d’affection pour ma personne. C’était un homme d’une grande rigueur morale et
intellectuelle, et surtout un patriote. Lorsqu’il me reçût dans le bureau de
François Soudan qui le lui cédait quand il était de passage à Paris, d’entrée,
il m’annonce qu’il s’était rendu à Lisbonne le vendredi 20 novembre 1970 en
compagnie de Commandant Diallo Thierno, qui était attendu sur le tarmac de
l’aéroport par des officiers militaires portugais. Sur sa participation, il ne
m’en dira pas assez. Néanmoins, mes investigations m’ont permis de savoir qu’il
s’était rendu le même jour aux Îles du Cap Vert avec Cdt Diallo Thierno où,
tous deux, ils ont embarqué sur le navire de guerre qui débarqua les
mercenaires sur les plages côtières de Conakry. Siradiou est souvent présenté
aux yeux de l’opinion publique comme le cerveau de cette opération militaire.
C’est archi faux. Il a été utilisé par Cdt Diallo Thierno qui, avant le voyage en Guinée, avait fait séquestrer quelque
part en Europe M. Louis David Soumah, le véritable meneur de cette opération
militaire. Révoltés, ce sont les amis de celui-ci à Dakar, qui auraient alerté
le président Sékou Touré pour faire échec à l’agression, ne voulant pas que
Diallo Thierno devint le nouvel homme fort de la Guinée.
A suivre !
Sékou Cherif Fadiga