En Guinée, l’action politique n’a plus aucun sens, du fait qu’elle n’est pas motivée pour la défense de l’intérêt général.

Il a fallu attendre l’année 2010 pour voir accéder au pouvoir un dirigeant politique qui se réclame opposant, en l’occurrence Alpha Condé. Depuis, les Guinéens ont eu l’occasion de constater par eux-mêmes quelle était la raison principale de son combat politique : prendre la place du général Lansana Conté et faire comme lui ou pire que lui dans la mal gouvernance de notre pays. Ça fait 60 ans que ça dure, au point que pour les Guinéens, l’engagement politique se résume à prendre le contrôle de l’Etat pour vivre au frais du contribuable, dilapider les ressources et jouir de tous les privilèges du pouvoir en toute irresponsabilité.

En Guinée, l’action politique n’a plus aucun sens, du fait qu’elle n’est pas motivée pour la défense de l’intérêt général. Il n’y a aucun contrat politique qui lie les gouvernants aux gouvernés, ni aucune obligation de résultats pour les premiers. C’est ainsi que depuis 60 ans, les détenteurs du pouvoir, pour cacher leurs échecs, pourfendent leurs opposants présentés aux populations comme les ennemis du pays. Et cette propagande bien huilée marche à merveille : c’est toujours l’opposition qui empêche le pouvoir de travailler pour le bien-être des Guinéens.

Nous voyons bien qu’en réalité, les acteurs politiques ne croient en rien. Nous critiquons, à juste titre, l’exploitation coloniale, mais, il faut retenir que les colons et les néo-colons actuels nous ont prouvé, qu’il y a de la richesse dans notre pays et qu’ils ont été capables de nous faire travailler pour la créer abondamment à leur profit. Pourquoi pas nous, cette fois-ci pour notre propre compte? Vous vous rendez compte, au temps colonial, nous avions l’autosuffisance alimentaire, nous exportions plusieurs produits agricoles et voilà que depuis l’indépendance, nous sommes incapables d’assurer cette autosuffisance alimentaire, ni de maintenir nos exportations agricoles. Nous savons tous qu’après la conquête de notre territoire, les colons ont établi des règles en installant une administration qui a parfaitement fonctionné selon des lois et règlements. Pourquoi, nous nous sommes incapables de respecter les lois et règlements fixés par nous-mêmes depuis 60 ans ? Vous comprenez donc pourquoi nous sommes devenus pauvres et privés de nos droits humains inaliénables par une caste sans foi, ni loi? Comment voulez-vous qu’on se tire d’affaire, lorsque les lois et règlements sont bafoués dans le pays?

Il y a une confusion politique qui est créée en Guinée pour tromper les Guinéens. En effet, ceux qui prétendent combattre le pouvoir, invoquent toujours ses violations des lois de la République. Que dire d’un responsable politique qui fustigeait le pouvoir sous prétexte de violations répétées des lois, mais qui, est prêt en même temps de lui, dès qu’il est sollicité, alors qu’il n’y a aucun changement positif de la gouvernance? Pour justifier leur participation à la « bouffe du pouvoir », ils nous disent toujours que c’est pour l’intérêt du pays.

Quel est l’intérêt de notre pays? Non, pour cette faune politique, l’intérêt national n’existe que dans leurs discours, ce qui compte le plus, c’est la préservation des privilèges. Les notions de positionnement idéologique ne sont valables qu’en occident, pas chez nous où le dénominateur commun reste l’accaparement à leur profit exclusif de la richesse nationale. On ne fait que singer les institutions étatiques des pays dignes de ce nom, chez nous les dirigeants et les prétendants au pouvoir ne croient en rien et ne respectent rien. Le pouvoir est un moyen pour eux d’exercer une brutalité inouïe contre leurs propres compatriotes pour défendre des intérêts mesquins et égoïstes.  Qui souhaite être torturé, tué ou appauvri? Personne. Je rappelle que c’est au nom de la DIGNITÉ HUMAINE que nous avions invoqué notre droit à l’indépendance et que le préambule de notre Constitution du 10 novembre 1958 marque clairement « L’Etat de Guinée apporte son adhésion totale à la Charte des Nations unies et à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme » qui a été repris et complété par d’autres engagements internationaux dans les Constitutions de 1990 et 2010. Comment peut-on dans ces conditions soutenir, encenser des dirigeants qui n’ont pas traité dignement leurs compatriotes, en respectant leurs droits les plus sacrés garantis par la Constitution?

Qu’auraient dit nos ancêtres d’un dirigeant qui viole son serment, qui tue volontairement les siens sans aucune base légale? Voilà le nœud de notre problème. Je peux comprendre la majorité de la population maintenue arbitrairement dans l’analphabétisme, mais pas les élites qui cautionnent le non-respect de la Loi Suprême de notre pays. On peut donner tous les noms possibles à l’opposition, mais ce qui est clair, la base qui fonde la résistance à un pouvoir, c’est le respect de la Constitution. On ne doit pas considérer fréquentable, un pouvoir qui viole délibérément les dispositions de la Constitution de la République. Le garant du respect des Règles, qu’ils soient justes ou injustes, est tenu de les respecter. Les pires dictatures en Asie et en Amérique latine se sont appuyés sur des lois liberticides pour oppresser leurs peuples, c’est tout le contraire chez nous où les dirigeants font fi des lois et sévissent contre les populations selon leurs humeurs. C’est pourquoi il était plus facile pour ces pays de passer de la dictature à l’Etat de droit, parce qu’au moins, ils ont la culture du respect des lois en vigueur, ce qui n’est pas le cas en Guinée.

Alpha Condé est le chef d’un pouvoir irrespectueux du droit, qui procède au pillage systématique des richesses minières et des ressources financières du pays. Les dirigeants politiques qui collaborent avec lui, le font dans l’objectif de prendre leur part du butin et rien d’autre que ça. C’est très triste pour nous, il faut rappeler que nous étions au même niveau de pauvreté que la Corée du Sud en 1960, aujourd’hui, elle est une puissance industrielle et technologique respectée dans le monde, alors que la Guinée est rangée parmi « les pays de merde ». Pour quelle raison collaborer avec les responsables de cette situation de « merde » que sont Alpha Condé et sa clique? Il faut cumuler les budgets de la santé et de l’éducation durant ses huit ans de pouvoir pour se rendre compte qu’il se moque des Guinéens. Que dire de l’agriculture, des travaux publics, de la protection de l’environnement etc. De 2015 à 2017, la production de bauxite a bondi pour atteindre près de 50 millions de tonnes. Les productions de l’or et du diamant sont quasiment des données secrètes au public. Malgré cette forte augmentation de la production, le total des revenus miniers de bauxite, or et diamant est de 278 millions de dollars en 2017. L’or a rapporté à l’Etat du Mali 513 millions de dollars en 2016.

Il a vendu notre pays à la Chine et pour nous enchaîner sans risque de nous échapper, il nous endette en milliards de dollars en contrepartie d’infrastructures tape-à-l’œil. Pour défendre ses intérêts miniers, il n’a pas hésité à massacrer les pauvres villageois dans leur sommeil à Zogota. Tous ses deals miniers sont secrets, c’est l’opacité qui règne. Sur le champ politique, ce sont les Forces vives qui ont demandé le toilettage de la Constitution de 1990, ce qui fût fait par le CNT en 2010. Il est devenu président sur la base de cette Constitution, est-ce normal qu’il ne l’applique pas? Est-ce normal qu’il fasse tuer des Guinéens qui n’ont fait que réclamer l’application de cette Constitution? Ce sont ces faits concrets qui disqualifient Alpha Condé.  Pourquoi se fâcher contre les dirigeants étrangers qui nous méprisent pour cette raison, alors que ce sont les nôtres qui sont les responsables de notre faillite? Il n’y a donc aucune raison objective de faire du chemin avec Alpha Condé. Il doit être combattu jusqu’à ce que l’Etat de droit soit établi dans notre pays. On n’est pas en démocratie pour qu’il soit un partenaire, il n’est qu’un autocrate qui s’impose au pays par la force brutale. Naturellement, ses thuriféraires sont là pour dire le contraire à des populations traumatisées et fragilisées par 60 ans de violences d’Etat. Il faut montrer la face hideuse de ce pouvoir. Les Guinéens méritent mieux que la vie de misère qu’ils mènent depuis que ces bandes de hors-la-loi se sont emparés du pouvoir. Qui peut se satisfaire de l’état de notre pays, si ce n’est qu’un oppresseur ou un ignorant abruti par la propagande du pouvoir?

J’aime bien l’exemple de la Corée du Sud. Les étudiants étaient le fer de lance de la lutte démocratique et avec eux, l’ensemble des acteurs politiques et syndicaux sont restés fermes et persévérants jusqu’à la chute de la dictature militaire, qui a réussi pourtant le miracle économique de la Corée du Sud dans les années 1970 et 1980.

Nous devons donc savoir clairement pourquoi nous luttons, afin de ne pas nous contenter d’une manœuvre trompe-l’œil présentée comme une avancée démocratique. On n’a pas besoin d’une foule, mais une minorité agissante, déterminée, consciente des enjeux suffit pour changer la réalité nationale. Comme les jeunes combattants Coréens, il faut des convictions fortes et non des girouettes qui changent au gré des miettes qu’on leur jette comme appât. C’est le moment de se réveiller, car l’Afrique inquiète le reste du monde. Nous sommes 1,3 milliards en 2017 et nous seront 2,5 milliards en 2050, tous les signes annonciateurs de l’explosion de la bombe démographique sont là à cause de l’irresponsabilité de dirigeants inconscients qui refusent de faire leur job. Ce qui aurait dû être un atout formidable à l’image de la Chine et de l’Inde, risque d’être un cauchemar pour nous, les morts dans le désert et la mer Méditerranée sont déjà un avertissement.

C’est pourquoi, un dirigeant comme Alpha Condé, ne doit être une référence pour notre jeunesse, c’est plutôt une menace ambulante pour elle dont l’éducation est bafouée, sans autre perspective que le chômage de masse. « Ceux qui luttent, sont ceux qui vivent ».

Mr. Alpha Saliou Wann